Léon Mba
Gabon
Léon Mba né en 1902 et mort en 1967, fut le premier président du Gabon de 1961 à 1967.
Professional Information
Position:
President de la République
Working primarily in:
Gabon
Description of Work:
En 1946, Léon Mba rentre au Gabon où il est triomphalement accueilli par ses amis. Sil ne réintègre pas ses fonctions de chef de canton, il obtient toutefois un poste important dans la maison de commerce anglaise John Holt. Cette même année, il fonde le Comité mixte gabonais (CMG), un parti politique proche du Rassemblement démocratique africain (RDA), le parti interafricain de Félix Houphouët-Boigny. Jouant sur son passé dancien exilé, et grâce au réseau du Bwiti, il parvient à rassembler autour de lui les Fangs du sud ainsi que certains Myènè. Son but est alors de conquérir les postes administratifs et judiciaires indigènes.
Fort de son succès à Libreville, il aspire, un certain moment, à devenir le chef supérieur de la région comme lavait réclamé la majorité des notables fangs lors du congrès des chefs de lethnie à Mitzic en 1947. Mais il se heurte au refus des autorités coloniales. Bien que le CMG ne soit nullement doctrinaire mais juste opportuniste, Léon Mba, à cause de ses relations avec le RDA affilié au PCF, fait figure de communiste et de propagandiste dans la colonie ; ces soupçons sont confirmés pour les autorités lorsquil participe en 1949 au congrès du RDA à Abidjan.
En 1951, en même temps que le RDA rompt avec les communistes, Léon Mba, tout en gardant chez son électorat son image de « révolté », se rapproche de ladministration française . Mais cette dernière soutient déjà son principal opposant, le député Jean-Hilaire Aubame qui nest autre que le fils nourricier de son demi-frère et son ancien protégé. Aux élections législatives du 17 juin 1951, il ne recueille que 11% des suffrages exprimés tandis que Aubame est réélu. Aux élections territoriales de mars 1952, lUnion démocratique et sociale gabonaise (UDSG) dAubame remporte 14 des 24 sièges contre deux pour le CMG qui reçoit cependant 57% des suffrages exprimés à Libreville.
Isolé à lAssemblée territoriale, il sallie avec les colons privés représentés à lAssemblée. Il quitte également le CMG pour rejoindre le Bloc démocratique gabonais (BDG) de Paul Gondjout, dont il compte prendre la direction. Aux élections législatives du 2 janvier 1956, Léon Mba obtient cette fois-ci 36% des suffrages contre 47% pour Aubame. Même sil nest pas élu, il devient le leader autochtone du territoire, et certaines personnalités du UDSG passent de son côté. Aux élections municipales de 1956 où les listes présentées sont au collège unique (Africains et Européens confondus), Léon Mba reçoit le soutien des colons et remporte la mairie de Libreville avec 65,5% des suffrages ; il devient ainsi, le 23 novembre, le premier maire de la capitale.
Aux élections territoriales de mars 1957, le BDG arrive une nouvelle fois second, avec 16 sièges sur 40 contre 18 pour lUDSG. Suite à des retournements douteux, le parti de Mba obtient 21 sièges contre 19 pour celui dAubame. Mais, faute de majorité absolue, les deux partis sont contraints de présenter, le 21 mai 1957, une liste commune pour lélection du gouvernement qui se fait au détriment dAubame. Le même jour, Léon Mba est nommé vice-président du Conseil du gouvernement. Rapidement, des dissensions apparaissent au sein du gouvernement qui poussent Aubame à faire démissionner ses partisans du gouvernement et à déposer une motion de censure contre le gouvernement. La motion est repoussée par 21 voix contre 19. Face à cette victoire de Mba, de nombreux élus UDSG passent dans la majorité parlementaire, donnant au gouvernement 29 députés sur 40. Bien installé aux affaires, il conforte peu à peu son pouvoir.
Après un « oui » massif au référendum sur la Communauté franco-africaine du 28 septembre 1958, le Gabon accède à lautonomie. En décembre 1958, lAssemblée vote sa transformation en Assemblée législative, puis promulgue le 19 février 1959 la constitution de la République du Gabon. Le 27 février, Léon Mba est nommé Premier ministre. Pourtant en novembre 1959, il se prononce ouvertement pour la départementalisation du Gabon. Jacques Foccart, le « Monsieur Afrique de lElysée », lui fait comprendre que cette solution est impensable. Il décide alors dadopter le drapeau tricolore qui se serait différencié du drapeau français par lapposition du dessin de larbre national, laucoumea. Là encore, Foccart refuse.
Dès juillet 1958, une troisième force politique tente de simposer au Gabon : le Parti de lUnité nationale gabonaise (PUNGA) mené par René Sousatte et Jean-Jacques Boucavel. Après avoir appelé au « non » lors du référendum de 1958, le PUNGA organise plusieurs manifestations, soutenues par lUDSG, afin d'obtenir lindépendance et la tenue de nouvelles élections législatives. En mars 1960, sachant que lindépendance est déjà donnée par la France, Mba fait interdire par le Conseil des ministres le PUNGA puisque son objectif avoué est atteint. Puis, il lance un mandat darrêt contre René Sousatte sous prétexte quil comploterait, et des perquisitions ont lieu au domicile de membres de lUDSG, soupçonnés de complicité. Intimidés, trois députés UDSG rejoignent la majorité gouvernementale représentant désormais 32 députés sur 40.
Le 19 juin 1960, des élections législatives au scrutin de liste majoritaire à un tour sont organisées. Grâce à un découpage des circonscriptions et au nombre de sièges attribués par district, le BDG soctroie arbitrairement 244 sièges tandis que lUDSG nen remporte que 77. Le 17 août, lindépendance est proclamée. Toutefois, réaliste, le Premier ministre gabonais déclarait le 12 août :
« Ne gaspillons pas notre chance en imaginant quavec lindépendance, nous détenons désormais un fétiche tout puissant qui va combler tous nos vux. En croyant quavec lindépendance tout est possible et facile, on risque de sombrer dans lanarchie, le désordre, la misère, la famine. »
Léon Mba aspire à linstauration dun régime démocratique, condition nécessaire selon lui au développement et à lattrait des investissements au Gabon. Il tente ainsi de concilier les impératifs de la démocratie et la nécessité dune activité gouvernementale ferme et cohérente. Pourtant déjà, le régime montre des faiblesses. Un culte de la personnalité se développe progressivement autour de celui quon appelle désormais « le vieux » ou « le patron » ; des disques chantent ses louanges, des timbres et pagnes sont imprimés à son effigie.
En novembre 1960, une crise éclate au sein de la majorité. Prenant prétexte du remaniement ministériel sans consultation du Parlement, le président de lAssemblée nationale Paul Gondjout, pourtant allié de Mba, dépose une motion de censure. Gondjout espère sans doute bénéficier dun partage du pouvoir à son avantage, cest-à-dire linstauration dun parlement fort et dun Premier ministre disposant de lexécutif. Mba, qui ne partage pas ces idées, réagit de manière répressive. Le 16 novembre, sous prétexte dun complot, il décrète létat durgence, ordonne linternement de huit de ses adversaires au sein du BDG (dont Gondjout) et dissout le lendemain lAssemblée nationale. Les électeurs sont appelés à voter de nouveau le 12 février 1961.
Entre-temps, le 4 décembre, il est élu au poste de secrétaire général du BDG à la place de Gondjout. Il se tourne vers lopposition pour renforcer sa position. Il forme avec Aubame des listes dunion nationale, suffisamment équilibrées pour plaire aux électeurs bien qu'elles se fassent au détriment du leader de l'opposition. Le 12 février, elles remportent 99,75% des suffrages. Le même jour, Léon Mba est élu en tant que candidat unique à la présidence du Gabon. Pour le remercier pour son aide, Aubame est nommé ministre des Affaires étrangères à la place d'André Gustave Anguilé. En février 1961, il décrète de nouveau linternement dune vingtaine de personnes.
Le 21 février 1961, une nouvelle constitution est adoptée qui instaure un régime qualifié d« hyperprésidentiel ». Le président de la république, chef du gouvernement, nomme les ministres dont il détermine librement les fonctions et qui ne sont responsables que devant lui seul. Un rapport des services secrets français résume la nouvelle situation de la façon suivante :
« Se voulant et se croyant sincèrement démocrate, au point quaucune accusation ne lirrite davantage que celle dêtre un dictateur, il nen a pas moins eu de cesse quil nait fait voter une constitution lui accordant pratiquement tous les pouvoirs et réduisant le parlement au rôle dun décor coûteux que lon escamote même en cas de besoin. »
Bien que de 1961 à 1963, lUnion nationale permet aux deux rivaux de faire taire leurs querelles, un malaise politique naît au sein de la population, dautant que de nombreux étudiants sont emprisonnés lors de manifestations de contestation. Par ailleurs, le président nhésite pas à se faire justice lui-même ; il frappe, à laide dune chicotte, les citoyens qui lui manquent de respect, notamment les passants qui « oublient » de le saluer.
Le 9 février 1963, le président gracie les personnalités arrêtées en novembre 1960. Le 19 février, cest la rupture avec Aubame ; tous les ministres UDSG sont démis (soit deux ministres), à lexception de François Meye qui se rallie à Mba. Le président explique alors que :
« LUnion nationale na pas à être construite, elle existe en fait.»
Ayant pour objectif d'évincer Jean-Hilaire Aubame, son ancien ministre redevenu son grand rival, il le nomme, le 25 février, président de la Cour suprême. Par la suite, sous le prétexte dune incompatibilité de fonctions avec celles de parlementaire, Mba réclame sa démission de lAssemblée. Aubame résout le problème en démissionnant de son poste de président de la Cour suprême, contrariant ainsi les plans de Mba. Face à des rapports tendus entre le gouvernement et lAssemblée nationale, bien que celle-ci soit acquise à 70% par le BDG, le président gabonais la dissout le 21 janvier 1964. Lopposition annonce dès lors son refus de participer au futur scrutin quelle ne considère pas comme équitable.
Dans la nuit du 17 au 18 février 1964, aux environs de cinq heures du matin, 150 militaires gabonais dirigés par les lieutenants Jacques Mombo et Valère Essone, arrêtent le président Léon Mba, le président de lAssemblée nationale Louis Bigman, et plusieurs ministres. Par la radio, les militaires annoncent au peuple gabonais le coup dÉtat et demandent à lassistance technique française de ne pas simmiscer dans laffaire. Léon Mba est obligé de prononcer une allocution radiodiffusée où il reconnaît sa défaite :
« Le jour J est arrivé, les injustices ont dépassé la mesure, ce peuple est patient, mais sa patience a des limites
il est arrivé à bout. »
Durant ces évènements, aucun coup de feu nest tiré. Le peuple ne réagit pas, signe selon les militaires de lapprobation du putsch. Un gouvernement provisoire est constitué, et sa présidence est offerte à son grand rival Jean-Hilaire Aubame. Il nest composé que de personnalités politiques civiles, provenant aussi bien de lUDSG que du BDG comme Paul Gondjout. Quant aux putschistes, ils se contentent dassurer la sécurité civile. Dailleurs, toute la petite armée gabonaise nest pas intervenue dans le coup dÉtat ; encadrée en majorité par des officiers français, elle est restée dans ses casernes.
Des instructions sont données pour que Léon Mba soit transféré à Njolé, fief électoral de Aubame. Mais du fait de violentes pluies, le président déchu est amené à Lambaréné, à 250 kilomètres de Libreville. Le nouveau chef du gouvernement, Aubame, prend rapidement contact avec lambassadeur français, Paul Cousseran, afin de lui assurer que les biens des ressortissants étrangers seront protégés et éviter ainsi toute intervention militaire.
Mais à Paris, le général de Gaulle et Jacques Foccart en ont décidé autrement. En effet, Mba était un des plus fidèles alliés de la France en Afrique ; en visite en France en 1961, il avait affirmé :
« Tout Gabonais a deux patries : la France et le Gabon. »
De plus, sous son régime, les Européens jouissaient dun traitement particulièrement amical. Les autorités françaises décident donc, en conformité avec des accords franco-gabonais signés, de rétablir le gouvernement légal. Toutefois, lintervention ne peut être déclenchée sans une requête officielle du chef d'État gabonais. Léon Mba étant constitutionnellement « empêché », les Français font appel au vice-président gabonais, Paul Marie Yembit, qui navait pas été arrêté. Mais celui-ci reste introuvable ; il est donc décidé de rédiger une lettre anti-datée que Yembit signerait plus tard. Ainsi, dans la nuit du 18 au 19, les troupes françaises de Dakar et Brazzaville débarquent à Libreville et rétablissent Mba au pouvoir. Les combats ont fait un mort du côté français, et 15 à 25 du côté gabonais.
Réinstallé au pouvoir, Léon Mba refuse de considérer que le coup dÉtat était dirigé contre lui et son régime. Pour lui, il sagissait dun complot contre lÉtat. Rapidement pourtant, des manifestions anti-gouvernementales ont lieu avec des slogans comme « Léon Mba, président des Français ! » ou réclamant la fin de la « dictature ». Elles se solidarisent avec Aubame lorsque le 23 mars, il est inculpé. Bien que certainement innocent des préparatifs du coup dÉtat, ce dernier est condamné à lissu dun procès, à 10 ans de travaux forcés et 10 ans dinterdiction de séjour.
Malgré ces évènements, les élections législatives davril 1964, prévues avant le putsch, sont maintenues. Lopposition se voit privée de ses grandes figures, empêchées de participer au scrutin du fait de leur compromission dans le putsch. LUDSG disparaît de la course électorale et lopposition nest composée que de partis sans envergure nationale, défendant la démocratie ou des intérêts régionaux. Cette dernière remporte toutefois, dans un scrutin de liste majoritaire à un tour, 46% des suffrages et 16 sièges sur 47, tandis que le BDG reçoit 54% des suffrages et 31 sièges.
Léon Mba ne se remit jamais du putsch. Ses amis français nont de cesse alors de lentourer, le protéger, le conseiller. Une garde présidentielle, véritable troupe délite, est formée par un ancien barbouze français, Bob Maloubier, et cofinancée par les groupes pétroliers français. Ces derniers, installés dans le pays depuis 1957, avaient renforcé leurs intérêts en 1962 après la découverte et l'exploitation des premiers gisements off shore. Le Gabon devint une pièce majeure dans l'approvisionnement pétrolier de la France. Leur influence est telle que le PDG de l'Union générale des pétroles (devenu en 1967 ELF Aquitaine), Pierre Guillaumat, prit part à la décision de lintervention militaire. Dailleurs, le pétrolier gaulliste, Guy Ponsaillé, est nommé, par la suite, conseiller politique du président et devient le représentant des entreprises françaises auprès de Mba. Mais le président gabonais a peur ; il reste cloitré dans son palais présidentiel surprotégé. Ponsaillé parvient à le modérer dans ses décisions et le convainc de laccompagner dans les provinces du pays afin de restaurer son image auprès des Gabonais.
Quant aux ambassadeurs français Cousseran et américain Darlington, soupçonnés de sympathie envers Aubame, ils quittent peu de temps après les évènements le Gabon. Le nouvel ambassadeur français est François Simon de Quirielle, un « diplomate traditionnel », bien décidé à ne pas interférer dans les affaires intérieures gabonaises. Au bout de quelques mois de malentendus, Léon Mba contacte Foccart pour lui dire quil ne supporte plus cet ambassadeur :
« Vous vous rendez compte, explose le président gabonais, je reçois de Quirielle pour faire un tour dhorizon avec lui. Je lui demande ce quil pense de tel ministre [gabonais], de telle question qui est à lordre du jour [de la politique intérieure du Gabon]. Devinez ce quil me réplique! Monsieur le président, je suis désolé, les fonctions que joccupe minterdisent dintervenir comme vous me le demandez dans les affaires de votre pays. »
À la suite de cet incident, Foccart fait nommer à Libreville, « un colonialiste », Maurice Delauney, qui sinstalle tel un véritable haut-commissaire.
Dès 1965, les Français cherchent un successeur à Léon Mba, vieillissant et malade. Ils le trouvent en la personne de Albert-Bernard Bongo, jeune chef de cabinet du président. Ce dernier est personnellement « testé » par le général de Gaulle en 1965, lors dune visite à lÉlysée. Confirmé comme successeur, Bongo est nommé le 24 septembre 1965 ministre délégué à la présidence, mais occupe dans les faits les fonctions dun Premier ministre.
En août 1966, Mba est hospitalisé à Paris et ne retourne plus au Gabon. Malgré son incapacité à gouverner, le président saccroche au pouvoir ; ce nest quaprès de longues insistances de Foccart, que Mba accepte, le 14 novembre 1966, de nommer Bongo vice-président à la place de Yembit, par un message radiotélévisé, enregistré dans sa chambre de lhôpital Claude-Bernard à Paris. Une réforme constitutionnelle en février 1967 légitime le dauphin. Les préparatifs de la succession sont finalisés par des élections législatives et présidentielles anticipées, organisées le 19 mars 1967. Aucun opposant nose se présenter, Léon Mba est réélu avec 99,90% des suffrages tandis que le BDG remporte tous les sièges de lAssemblée. Après sêtre déplacé tant bien que mal à lambassade du Gabon afin de jurer sur la constitution, Mba décède le 28 novembre 1967 à lhôpital, des suites de son cancer. Albert-Bernard Bongo lui succède constitutionnellement à la présidence.
Biographical Information
Léon Mba
(At a Glance)
Date of Birth: Feb/9/1902
: male
Interests: Politique, Culture, Sport, Art
Place of Origin: Gabon
Issu de la tribu Essoké de lethnie
Fang, Léon Mba naît le
9 février 1902 à
Libreville. Son père, petit gérant de commerce
, aurait été un temps le coiffeur de
Pierre Savorgnan de Brazza. Sa mère, Louise Bendome, était couturière
. Tous deux sont allés à lécole
et furent parmi les premiers « couples évolués » de Libreville
. En
1909, il entre au
Séminaire de Libreville pour ses études
. Brillant élève, il y obtient son brevet élémentaire.
À partir de
1920, il devient tour à tour employé de magasin, exploitant forestier, commerçant, puis entre dans l
administration coloniale française comme commis des douanes
.
Sil donne entière satisfaction à ses supérieurs, Léon Mba les inquiète
cependant par « son militantisme en faveur de lhomme noir »
, plus particulièrement en faveur des Fangs. En septembre
1922, il écrit à Edmond Cadier, lieutenant-gouverneur du Gabon :
- « Si dun côté le devoir fondamental dinstruire les Pahouins
concorde par su[r]croît avec les intérêts économiques, militaires et
même politiques les plus évidents du Gabon, de lautre côté leur
accroissement en dignité humaine et laugmentation de leur bien-être
matériel, demeurent, Monsieur le Gouverneur, la légitimation première
de lautorité française sur eux. »
Ses remarques dérangent, et il en subit les conséquences en décembre 1922
.
Ayant commis un délit mineur en fournissant à un collègue des documents
falsifiés, il est puni d'une peine de prison au lieu dune simple amende
. Il lui est également reproché sa
polygamie et son manque de compréhension des mesures dhygiène.
En
1924 (ou
1926), Léon Mba est réhabilité par les autorités coloniales qui le désignent pour remplacer un défunt chef de canton de Libreville
.
Se revendiquant comme un meneur des jeunes intellectuels de Libreville,
il néglige les conseils des anciens Fangs et gagne rapidement une
réputation dhomme sévère
. Il écrit dailleurs dans une lettre :
« Ayant mission de faire respecter lordre public et défendre
lintérêt général, je ne souffre pas quon transgresse les ordres reçus
de lAutorité que je représente. »
Léon Mba na pas une vision idéaliste de son poste ; il le conçoit comme un moyen pour senrichir.
Ainsi, avec son collègue Ambamany, il utilise le service obligatoire
des habitants du canton à des fins personnelles, pour couvrir leurs
énormes dépenses. Bien quau courant de ces malversations, ladministration coloniale les « ignore ». Toutefois, à partir de 1929, il devient suspect auprès de ladministration qui intercepte une de ses correspondances avec Kouyaté, le secrétaire de la Ligue des droits de lHomme, accusée dêtre une alliée du Kominterm.
Malgré cette réputation de pro-communiste, les autorités françaises ne
s'opposent pas à sa désignation au poste de chef supérieur de
lEstuaire par ses collègues.
Dans ces années, selon toute vraisemblance, Léon Mba prend ses
distances avec le christianisme, sans rompre totalement avec sa foi, et
devient un adepte de la secte Bwiti à laquelle les Fangs sont tout particulièrement réceptifs. En 1931, la secte est accusée du meurtre dune femme dont les restes sont découverts près du marché de Libreville. Accusé de complicité, même si sa participation au crime nest pas prouvée, Léon Mba est destitué et est condamné à trois ans de prison et dix ans dinterdiction de séjour, ne serait-ce que pour les détournements dimpôts et les abus quil a commis dans le traitement de la main-duvre locale.
En détention en
Oubangui-Chari, tout dabord à
Bambari puis à Bria
,
il continue dexercer une influence chez les Fangs de sa région
dorigine grâce à une correspondance avec ses compatriotes à Libreville
. Inquiété par cette situation, le gouverneur-général Antonetti ordonne en
1934, quà la fin de sa peine carcérale, il soit placé sous surveillance en Oubangui-Chari
.
De ces années dexil, il profite pour transcrire les usages
coutumiers du peuple Fang dans l« Essai de droit coutumier pahouin »
quil publie en 1938, dans le Bulletin de la société des recherches congolaises. Cet ouvrage devient rapidement la référence obligée des juges coutumiers fangs. En 1939, lex-chef indigène est toujours persona non grata au Gabon, comme en témoigne cette lettre du chef de département de lEstuaire, Assier de Pompignan :
« Cest que Léon MBa nétait pas seulement le chef qui sétait
approprié pour des besoins personnels les deniers de la colonie. Il
jouissait aussi aux yeux de ses congénères dun prestige considérable
quil tirait des pratiques de sorcellerie auxquelles il sadonnait.
Comme il était intelligent, il exploitait cette situation pour
rançonner les gens quil avait charge dadministrer et qui le
redoutaient ainsi que la camarilla dont il sétait entouré. Mais il
savait, par contre, amadouer les représentants de lautorité, endormir
leur vigilance et capter leur confiance. Cest ce qui explique quil
ait, des années devant, commis toutes sortes dexactions sans jamais
être autrement inquiété. »
Bien quen exil, Léon Mba est employé par les administrateurs
locaux. Placé dans des fonctions subalternes et nexerçant aucun
pouvoir propre, il est un employé compétent et précieux
.
Grâce à des rapports élogieux, il est de nouveau perçu comme un élément
indigène fiable sur lequel ladministration coloniale peut compter
. En
1942, une réduction de peine lui est accordée. (source wikipédia)